jeudi 21 janvier 2016

17

Le 17 décembre je prenais un avion pour la France.

J'avais acheté mon billet plusieurs mois en avance, pour passer les fêtes en famille mais peu de temps après j'ai appris que je ne pourrai pas payer les frais de scolarité plus longtemps.
Mon visa d'étudiant prenant fin dès lors que je ne paye plus l'école, me voila de retour au pays :)

Durant ces 15 derniers mois, la vision de ma vie dans l'un et l'autre des pays a beaucoup évolué, et je suis passée par plusieurs phases :

Dans un premier temps, j'ai renié la France! J'avais besoin de partir, de voir le monde, de construire mon futur loin de beaucoup de choses, j'avais soif d'aventures, et plus je découvrais Tokyo plus ma vie d'avant me semblait monotone, ennuyeuse, fade... les premiers mois au Japon ont été comme un rêve ! Merveilleux ! Parce que je n'avais pas encore de recul sur la société nippone, parce que je ne voulais pas voir les défauts, parce que je voulais que se soit exactement comme je l'imaginais.

Puis j'ai eu des périodes de doutes, de difficultés, de désillusions, après la prise de conscience , je n'ai plus vu que le négatif et la France m'est petit à petit apparu comme un refuge qui m'attendait, loin de cette galère.
J'en ai parlé à mon ami Atsu qui a vécu deux ans en Russie, et qui a connu ce phénomène. Il m'a dit que pour lui, être rentré quelques semaines au Japon lui avait permis de s'en dégouter assez pour rêver de nouveau de Russie. A ce moment je m'étais dit qu'il avait surement raison.

A la fin de l'été, j'ai voulu rentrer, j'y ai songé souvent, je voulais profiter de mon séjour pour les fêtes pour éventuellement ne plus repartir. Mais quand la nouvelle est tombée, que je n'ai plus eu le choix, que cette décision ne dépendait plus de moi, j'ai paniqué, j'ai réalisé que c'était une erreur , j'ai plus voulu partir, je ne voulais plus quitter ce pays que malgré tout j'aime tant.

Même si ce retour en France a été fait à contre cœur, j'ai essayé de voir le coté positif, en me disant
qu'avec le temps, les expériences, les rancœurs se seraient dissipées et que rentrer serait une bonne occasion de redécouvrir mon pays d'un autre œil. Mais plus le jour J approchait plus mon cœur se serrait.

Je suis arrivée à Tokyo un 17, et le hasard a voulu que je la quitte un 17...

Je m'étais levée très tôt, vers 5 heure, je n'avais pas réussi à dormir.
Sur le pas de la porte, le vieil Allan qui fumait. Il ne s'attendait pas à me voir, moi non plus. On n'a pas su quoi se dire, mais les larmes qui montaient dans ses yeux m'ont fait réaliser que j'étais sur le départ, pour de bon.

J'ai pris un bus pour l'aéroport de Narita, je tombais de fatigue, bercée par les aléas du trajet, mais j'ai refusé de m'endormir ! Je voulais voir chaque maison, chaque rue qui s'éloignait un peu plus ! Le soleil levant éclairait les nuages d'un jaune pur et le ciel était bleu. Tokyo s'éveillait et moi je m'apprêtais à l'abandonner.

Le vol m'a paru beaucoup moins long que tout les autres, peut-être parce que je n'étais pas très impatiente d'arriver...J'avais peur du choc culturel, de ne pas retrouver mes marques, de me sentir différente et très vite je me suis rendue compte que mes craintes étaient fondées.

La toute première chose qui m'a marqué, lors de mon transit à Paris fut une jeune femme, que j'entendis arriver de loin, vu avec quel tonalité elle parlait au téléphone. Elle s'assit à coté de moi et à son portable entre nos deux oreilles, elle hurlait l'histoire de sa vie. J'avais mes écouteurs et pourtant je pourrais vous compter son histoire dans les moindres détails. Elle se dandinait sur son siège, faisait des grands gestes, mâchait un chewing-gum la bouche ouverte. Un cliché avait rarement été aussi bien illustré !

Je me suis surprise à me sentir agressée dans ma sérénité. J'ai trouvé ça d'un irrespect des plus total ! J'ai levé la tête et j'ai pris conscience que la plus grande majorité des français dans cette salle d'embarquement avait, à quelque choses près, le même comportement qu'elle. L'espace d'un instant mon peuple m'est apparu bien peu civilisé.

J'ai décidé de ne pas m'arrêter à ça et j'ai retrouvé ma famille à l'aéroport, quand même soulagée d'être bien arrivée après plus de 16 heures de voyage, mais déjà nostalgique d'être si loin de mon Japon....

NB :
Je suis retournée à la case départ pour quelques mois mais ne vous inquiétez pas les amis j'ai plus d'un tour dans mon sac ! Mon plan en tête pour la suite, je travaille à repartir très vite pour accomplir mon objectif : Sortir diplômée d'une école japonaise ! :D